"Il faut que la peinture serve à autre chose qu'à la peinture", Henri Matisse.
Alain Zenthner
18 décembre 2020

On devine bien que l’avenir de l’humanité ne peut passer que par un gouvernement mondial (comme le suggérait déjà Albert Einstein), somme toute logique, pour pouvoir gérer le climat, les pollutions, les ressources, les pandémies et assurer dans le futur, le plus court possible, une qualité de vie raisonnable à toutes les populations sur la planète ce qui seul permettra de freiner les tentations de migrations, de tarir les sources de conflits et du terrorisme. Dès lors, les frontières et les nationalismes (ou souverainismes) devront s’assouplir, les pays ne pouvant faire autrement que de céder une partie de leurs pouvoirs.

Le problème est que sa formation risque d’être avant tout motivée par le profit financier, l’appétit d’extension planétaire de l’économie néolibérale qui n’enrichit qu’une petite minorité en continuant de creuser les inégalités (comme c’est le cas pour l’Union européenne). La survie de l’humanité dépendra donc de la volonté réelle de travailler dans l’intérêt général en cherchant à harmoniser de plus en plus notre mode de vie avec les rythmes de la nature. Ce sera un examen de passage fatidique…


26 novembre 2020

"Paradis fiscaux gardiens des méfaits de la tyrannie..."

L'économiste américain Tyler Cowen présente, dans un article du Bloomberg News (du 30 novembre 2017), les paradis fiscaux comme gardiens des méfaits de la tyrannie, prétendant qu’il y a un avantage moral à y placer son argent. Il déclare : Je voudrais défendre les services bancaires offshore en tant que rempart essentiel contre la tyrannie et l’autocratie inique. Ce n’est pas tant que de nombreuses institutions financières offshore, telles que les fonds spéculatifs enregistrés aux îles Caïmans, soient tout à fait légales, mais aussi que la pratique consistant à camoufler des richesses à l’étranger a ses bons côtés. (….)
Les comptes offshore compliquent la tâche des États autocratiques de saisir les revenus de leurs citoyens. C’est un frein aux dangers de la tyrannie.


On ne peut évidemment trouver aucun avantage moral au paradis fiscaux : échapper au fisc pour éviter de participer à l’entretien et au développement du bien commun – infrastructures, services, etc. - grâce auquel on a pu s’enrichir et faire fructifier son argent par des montages financiers (au détriment des contribuables) est pour le moins immoral.

Tyler Cowen est un chantre de l’ultralibéralisme cher aux États-Unis, un libertarien prônant la disparition de l’État. Son argument selon lequel les paradis fiscaux permettent de mettre ses actifs à l’abri d’un régime répressif est hypocrite et scandaleux, un prétexte grossier, un pur artifice pour essayer de justifier en dernier recours l’injustice énorme qu’ils représentent pour les populations qui subissent de ce fait pressions et dépravations vu les moyens de plus en plus restreints dont disposent les États pour développer et entretenir les infrastructures et les services au public : justice, police, enseignement, santé, culture, télévision, administration, défense, financement de la sécurité sociale et des retraites, etc.

Les avantages qu’ils pourraient présenter sont anecdotiques à l’échelle du monde et nuls au niveau de l’Occident. Tyler Cowen est le professeur type des Business School dont la mission est de formater ses étudiants pour perpétuer le système néolibéral.

Le néolibéralisme est peut-être nécessaire à redéfinir vu les interprétations dont il est l’objet. Le sens qu'on doit lui donner est celui de la politique économique antikeynésienne menée depuis la fin des années 1970 dans le monde anglo-saxon (avec Thatcher et Reagan) qui s’est vite étendue à l’Europe entière, une politique qui encourage une intervention limitée de l’état, une dérégulation des marchés (sans intervention politique) et la disparition progressive du secteur public avec bien sûr la dénonciation classique de l’État-providence, une appellation pernicieuse qui sous-entend un état permissif, trop secourable, auquel par ailleurs tout le monde se raccroche aujourd’hui et permet notre survie… On imagine où on en serait en ces temps de pandémie s’il ne fallait compter que sur le marché !

On imagine bien qu’un entrepreneur qui crée son entreprise dans un pays dictatorial le fait en connaissance de cause avec l’assentiment incontournable (sinon l’appui) du dictateur et des arrangements profitables réciproques (car la dictature signifie la corruption à tous les étages). L’argent provenant d’une entreprise d’un pays dictatorial qui aboutit dans des paradis fiscaux est toujours sale, certainement pas une fortune honnêtement gagnée par un gentil entrepreneur qui la mettrait à l’abri légitimement et Tyler Cowen le sait, mais cette pratique lui convient car elle apporte de l’eau à son moulin du capitalisme financier.

Par ailleurs beaucoup d’entreprises sous régimes autoritaires ne seraient pas aussi florissantes en dehors de tels régimes (voir Alibaba en Chine). Elles aiment les raccourcis que ceux-ci rendent possibles (moins d’entraves administratives, de freins aux nuisances, à la pollution, etc.). Les spoliations ou confiscations dont parle Tyler Cowen proviennent toujours d’une rupture de contrat tacite avec le régime autoritaire. Une fois qu’on lui a donné des facilités pour réussir l’entrepreneur se sent pousser des ailes, il en veut plus, trop (comme toujours)…

Les paradis fiscaux ne sont pas la conséquence d’un enfer fiscal comme il le prétend, mais l’opportunité d’éviter de contribuer au bien public, de préserver sa fortune, de la blanchir et surtout de la faire fructifier en organisant des montages financiers fumeux - que même les plus grands économistes et juristes ne peuvent pas détricoter - pour piller notamment les entreprises publiques avec bien sûr des complicités : hommes politiques et fonctionnaires arrosés de commissions, hommes parachutés aux postes décisionnels en vue de l’opération financière.

La chaîne de fast-food Quick qui valait 300 millions en 2004 a été vendue 760 millions en 2006 à la Caisse des Dépôts en France (un groupe public au service de l’intérêt général qui achète des hamburgers!). Au final, Quick aura permis de soustraire 1,3 milliard d’argent public qui s’est envolé vers des comptes privés offshore. Même mode opératoire pour Areva qui a acheté des gisements inexploitables d’uranium en Afrique pour 2,5 milliards (avec des bénéfices pareils – un million est une aumône - on parvient facilement à soudoyer les organismes d’évaluation et de contrôle). Petrobras (entreprise publique au Brésil) s’est laissé gruger de la même manière pour 12,7 milliards ! (en 10 ans) en rachetant une raffinerie en ruine à Pasadena. Le scandale politique qui en a suivi a amené la chute de Dilma Rousseff qui avait donné son aval à l’achat après avoir reçu un million de réaux pour financer sa campagne. (cf. Les prédateurs de Catherine Le Gall et Denis Robert, Le Cherche Midi, 2018)

Dès lors on peut penser que même un taux d’imposition de 10% n’empêcherait pas les paradis fiscaux de continuer à proliférer. En fait, l’enfer fiscal n’existe que pour le salarié - le travailleur qui ne peut échapper à l’impôt, pas le spéculateur - puisque la Belgique détient le record du monde de l’impôt sur le revenu (devant l’Allemagne, l’Italie et la France).

On sait qu’il y a le taux théorique d’impôt sur les sociétés et la pratique… En Belgique, bien qu'il soit passé de 33% en 2018 à 25% en 2020 des dizaines d’entre-elles ne paient que quelques pourcents (45 paient moins de 3%) et plusieurs ne paient rien (Sofina, KBC Ancora, Groupe Bruxelles Lambert, Arcelor Mittal, Ackermans & Van Haren, Basf Belgium, Solvac, etc.), le même phénomène se produit évidemment dans d’autres pays et en particulier en France.

La solution n’est certainement pas le communisme (dont le principe moteur est une socialisation économique et démocratique des moyens de production) surtout comme mis en pratique en ex-URSS (sous la contrainte extrême) dont on peut encore mesurer les dégâts à Cuba (où s’ajoute évidemment les effets de l’embargo des États-Unis). L’enseignement et les soins de santé y sont gratuits mais tout le pays est en déliquescence, en mode "débrouille"... La Russie, s'est d'ailleurs depuis jetée à corps perdu dans l’ultralibéralisme pour devenir elle-même un paradis fiscal.

Une économie étatique planifiée ne saurait à mon sens fonctionner parce qu’elle bride l’initiative personnelle, la création inattendue (en étouffant donc l’épanouissement personnel) et qu’elle mine le fonctionnement du marché en raison du mécanisme des prix que l’État est obligé de présupposer (l’offre et la demande).

La solution s’oriente plutôt vers une économie de marché contrôlée avec raison par l’État mais de manière ferme et attentive car on sait la nature humaine assoiffée de pouvoir et d’avoir. Sans contrôle suffisant, elle verse de suite dans la malversation, la prédation. L’État doit donner certes des facilités d’entreprendre mais veiller…

Quelques mesures simples pourraient être appliquées : en finir avec «le laisser faire» (la déréglementation), interdire la spéculation (opérations d’achat et de vente de titres financiers pour en tirer bénéfice souvent déconnectées de l’économie réelle, à noter que l’usure a été interdite jusqu’en 1885 par la religion catholique qui en percevait l’immoralité), inscrire l’État–providence dans nos institutions (c'est-à-dire doter l’État de larges compétences réglementaires en vue d’assurer un minimum de fonctions sociales au bénéfice de ses citoyens) pour créer une véritable Europe sociale qui donnerait l’exemple.

L’Union européenne, longtemps amorphe, lutte désormais avec de plus en plus d’efficacité contre les paradis fiscaux (avec d’ailleurs l’OCDE, le droit français et même américain bien que ce dernier est évidemment partial) mais, comme dans le dopage, les « évadés » gardent toujours une longueur d’avance.

Enfin, il faudra tôt ou tard (plutôt tôt) revenir sur notre modèle économique qui a pour principe moteur la création de richesse, le productivisme, la croissance… cesser d’en faire un graal, sachant que nous vivons dans un monde aux ressources naturelles finies que notre planète n’est pas en mesure de renouveler (la capacité de charge est déjà dépassée de 70%). Il faudra logiquement passer par une gouvernance mondiale pour en changer. Ce nouveau modèle ne pourra plus se permettre le jeu pernicieux des milliardaires dans les paradis fiscaux au détriment des populations. Mais il faudra certainement des catastrophes à répétition pour y parvenir.


15 mai 2020

"Paradis fiscaux augmentés et corrigés"

Dans les années 1970 en Belgique, on ne parlait de paradis fiscal qu’à propos du Luxembourg et c’était souvent avec légèreté et humour. Les comptes en banque anonymes semblaient y être largement répandus dans la classe moyenne (même inférieure). Cette évasion fiscale était presque bien vue, sinon applaudie dans l’opinion publique...

A l’époque, on pouvait encore évoquer pour les plus nantis la Suisse, les Principautés de Monaco, du Liechtenstein, ou d’Andorre... Mais on était loin d’imaginer que ces « paradis » allaient proliférer partout dans le monde pour s’élever au nombre de 88 en 2019 (chacun dans leurs spécialités) et que la Belgique en ferait partie en se classant même parmi les dix meilleurs (selon le magazine Forbes) avec les USA (et son État du Delaware), le Luxembourg, la Suisse, les îles Caïmans, le Royaume-Uni (avec sa City de Londres), l’Irlande, les Bermudes, Singapour et Hong kong.

Aujourd’hui, la fraude n’est plus «bon enfant», elle s’est mondialisée et le regard sur elle n’est plus complaisant mais détourné ou aveugle. Les paradis fiscaux ont désormais pris les rennes de l’économie mondiale et sont responsables de la dégradation des conditions de vie et de l’environnement. En effet, ils permettent à tout qui détient des capitaux suffisants (personnes physiques, entreprises, holdings, etc.) d’éluder l’impôt même légalement (en pratiquant ce qu’on appelle l’optimisation fiscale) au détriment du contribuable honnête qui se voit affecté dans sa vie quotidienne par les moyens de plus en plus restreints dont disposent les États pour développer et entretenir les infrastructures et les services publics (c'est-à-dire la justice, la police, l’enseignement, la santé, la culture, la télévision, l’administration, la défense), financer la sécurité sociale, les retraites, etc.

Les paradis fiscaux sont devenus les moteurs et fomenteurs de la politique néolibérale menée en Europe (et presque partout dans le monde) depuis le début des années 1980. Cette politique suscite une exaspération progressive de la majorité de la population qui ne semble pas cibler l’origine de la dépravation qu’elle subit (ni d’ailleurs les médias) puisque son mécontentement, sa frustration et son mal-être se traduit par des votes populistes qui leur sont profitables ! (puisque les partis qu’ils mettent au pouvoir sont généralement les plus ouverts au capitalisme financier).

La politique actuelle trouve sa source dans la recherche de profits toujours croissants des actionnaires de capitaux non déclarés mais cependant impliqués dans la moitié du flux financier mondial… L’évasion fiscale est évaluée à 825 milliards d’euros rien que dans l’Union européenne pour l’année 2019 (selon une étude du Parlement européen)
On sait de manière officielle que 172,3 milliards d’euros se sont envolés de Belgique en 2019 vers les paradis fiscaux que sont les Émirats Arabes Unis, l’Ouzbékistan, les Îles Caïmans, les Bermudes et le Turkménistan...

Chaque pays a sa niche. La Belgique par exemple impose lourdement les salaires et les revenus professionnels, mais applique une fiscalité douce aux multinationales, aux entrepreneurs et aux rentiers (on sait que la femme de ménage d’Albert Frère paie plus d’impôts – 4.140 euros - que les deux holdings de son patron – 152 euros). Elle offre des conditions particulièrement attractives pour les non-résidents, notamment en termes de transmission de patrimoine (que recherchent les fortunes françaises qui s’installent à Bruxelles) et un bénéfice sur les plus-values sur actions qui ne sont pas taxées (ce qui constitue une exception en Europe).

Les multinationales, dont le principe est de découpler le lieu où une transaction a été réalisée de manière effective et le lieu où elle est enregistrée et taxée, multiplient les filiales qui font du commerce entre elles, se facturent des biens, s’empruntent de l’argent, s’échangent des actions. Depuis 2006, les intérêts notionnels les attirent en Belgique, car ils permettent de déduire de leur base imposable les intérêts fictifs (notionnels) calculés sur les fonds propres (un pourcentage de 3% de ses capitaux) alors qu’ils ne l’étaient que sur leurs emprunts auparavant. Le système est généralisé aux 350.000 sociétés imposées en Belgique.

Les évadés fiscaux peuvent être n’importe qui : multinationales, grosses entreprises, institutions financières (banques, assurances, etc.), particuliers très fortunés, mais aussi des mafias (de la drogue, du sexe, des armes, etc.) puisque le secret bancaire est toujours d’application pour les plus nantis malgré ce que les gouvernements prétendent (d’après le témoignage en privé d’un banquier luxembourgeois !)

Ces détenteurs de capitaux sont devenus si puissants qu’ils sont en mesure d’établir des rapports de force avec les législateurs et de les rendre dépendants. Ces acteurs privés parviennent à susciter une mise en concurrence des États alors que l’intérêt du bien public voudrait que ce soit l’inverse. Chaque État cherche à être le plus avantageux pour qu’on s’implante chez lui en diminuant sans cesse le taux moyen d’impôts sur les bénéfices des sociétés ce qui se fait toujours au détriment du contribuable.

Les fers de lance sont des affairistes particulièrement doués (Albert Frère, Paul Desmarais, Bernard Arnault, etc.) pour exploiter l’argent public en faisant du profit personnel, détourner l’intérêt public vers l’intérêt privé. Ils s’acoquinent pour ce faire aux hommes politiques les mieux placés (parfois par leurs soins) et aux hauts fonctionnaires, en intégrant les lieux de pouvoirs (cercles, clubs, etc.), en investissant dans les meilleurs juristes et en s’associant aux banques d’affaires.

Pour augmenter leurs avoirs, ils cherchent à réduire au maximum le rôle des États en incitant la privatisation des services publics (dont ils ont néanmoins profité pour faire fortune), de groupes énergétiques, de compagnies de transport, de banques, de toute entreprise dont au moins 51% du capital social est détenu par une administration. Ils imposent pour ce faire des directives d’austérité mises au point dans les think tanks libéraux ou dans des organisations telles que la Société du Mont Pèlerin dont les bras armés sont les lobbies qui les répercutent en cascade sur le FMI, les banques centrales, la Commission européenne, le grand patronat et les partis politiques contraints de s’y soumettre (ceux qui s’y refusent comme Syriza en Grèce ou la Ligue du Nord en Italie ne peuvent résister longtemps).

L’argument récurrent est la dette publique qu’ils ont contribué à creuser (notamment pour sauver les banques privées) et qu’ils veulent faire rembourser à la classe moyenne la plus large sans y prendre part. Ils prônent dès lors une pression sur la productivité, une fiscalité élevée, une augmentation de la TVA, une restriction des effectifs, un blocage des salaires (avec des sauts d’index) et des allocations de retraites, un allongement des carrières, etc. Tous les secteurs des services publics se trouvent ainsi affectés.

Seuls les grands patrons, banquiers, actionnaires et leurs intermédiaires aux fonctions privilégiées (politiciens, hauts fonctionnaires européens, etc.) peuvent se permettre de conserver ou d’augmenter leurs rétributions et avantages (s’octroyer des parachutes dorés notamment).

Ce pouvoir profond de la finance mondiale parvient à organiser la démocratie à son avantage en agissant sur la votation des lois et réglementations, les systèmes électoraux qui leur laissent toute latitude pour gérer le pouvoir politique. Si bien qu’on réalise que les élections n’ont plus beaucoup de sens, la politique menée sous la contrainte et selon les libéralités étant toujours la même.

Pour exemple, en 2014 le parti du Premier Ministre, le plus disposé à appliquer cette politique profitable aux riches évadés, n’a reçu que 7,8 % des voix des Belges (si on tient compte des abstentions, votes blancs et nuls qui s’élèvent à 19,1 %). Charles Michel n’a donc dû son poste qu’à des manœuvres politiciennes, des pressions, des arrangements entre partis (que le grand public ignore) pour former une majorité qui gouverne au détriment d’autres qui ont récolté plus de voix.
Quant au système électoral français de la présidentielle (scrutin uninominal majoritaire à deux tours), il a permis de mettre au pouvoir en 2017 un homme politique qui n’a reçu que 17% des voix des Français (en tenant compte des abstentions), le second tour étant un vote par défaut pour éliminer l’extrême droite plutôt qu’un vote d’opinion.

On remarque que les paradis fiscaux sont traités de manière subalterne dans les médias et par les économistes (même rebelles au capitalisme financier) alors qu’ils expliquent les difficultés que rencontrent la majorité de la population et la dégradation accélérée des ressources naturelles (neuf des plus grandes entreprises qui participent de la déforestation de l’Amazonie ont des capitaux dans les paradis fiscaux). Ces capitaux cachés qui ne cherchent qu’à fructifier sont les promoteurs d’une prédation aveugle et malhonnête qui nous entraîne au-delà d’un point de basculement irréversible au-delà duquel les ressources de la planète ne peuvent plus se régénérer.

On voit bien que ce fléau de l'évasion fiscale sera difficile à endiguer puisqu’il est mondial et nomade, que même des soulèvements populaires de grandes ampleurs ne suffiront pas à le contrôler. Mais l’argument est un peu trop utilisé pour balayer le problème au point de ne plus le cibler.

Il faudra sans doute compter avec l’imprévu, un effet pervers ou excessif de leur action qui leur serait néfaste, des catastrophes telles que celles provoquées par le réchauffement climatique ou la prolifération de virus… qui mettraient enfin au grand jour leurs responsabilités avec, par exemple, la preuve scientifique qu’elles résultent de l’exploitation ravageuse des ressources et espaces naturels opérée par des grosses entreprises et multinationales aux capitaux cachés...

Les crises climatiques et sanitaires à venir, qui seront épongées jusqu’à plus soif par la population n’ayant pas accès aux paradis fiscaux, pourraient susciter une prise de conscience plus élargie de leur haute nocivité et créer enfin les conditions de leur dépérissement.


7 février 2020

L’impeachment confirme une fois de plus que les États-Unis sont un pays de l’esbroufe et de la fanfaronnade. On pourrait presque être admiratif devant une Constitution qui autorise une démarche de mise en accusation d’un président en exercice, prendre en exemple son principe démocratique, jusqu’au moment où on s’aperçoit qu’elle ne fixe pas les modalités de cette démarche et qu’elle laisse donc toute latitude aux lobbies et réseaux (soit les puissances financières) d’exercer leur influence et de faire de ce « jugement »une parodie.

La grande idée de moralité et de justice que les États-Unis prétendent défendre à travers ses films hollywoodiens, ses séries télévisées, ses médias, ses tribunaux fastueux et pavoisés, se liquéfie sous simple perfusion de quelques milliers de dollars… Nulle part ailleurs la justice ne fonctionne aussi ouvertement à deux vitesses : celle pour les pauvres et celle pour les riches (qui ont de facto des relations au sein du gouvernement), généralisant la libération sous caution pour ceux-là et infléchissant ses verdicts en fonction du niveau de réputation des avocats que les accusés peuvent se payer...


27 janvier 2020

Difficile de croire qu’au 21ème siècle un pays estimé parmi les plus civilisés et innovateurs soit capable d’élire (sans doute deux fois) un président qui ne croit pas en la science et accuse les scientifiques d’être des « prophètes de malheur » !

Ce président ne cache pas être un adepte du créationnisme, ce courant religieux (soutenu par les Églises protestantes) qui rassemble 40% des Américains (soit 133 millions de personnes !) qui croit que Dieu a créé l’homme dans sa forme actuelle et affirme que la Terre n’a pas plus de six mille ans ! (Ils ont consacré cent millions d’euros à la construction d’une arche de Noé grandeur nature – de 10.000 m² – en 2016 dans le Kentucky !)

Ces créationnistes n’entendent la science que lorsqu’elle profite à la puissance, l’enrichissement, la grandeur nationale au travers ses applications technologiques. Ils contestent ainsi sans complexes la théorie de l’évolution de Darwin (qui est prouvée scientifiquement) pour n’adopter que ses déviances (avec la complicité de l’auteur puisqu’il ne les a pas désavouées) : le darwinisme social de Herbert Spencer (qui justifie la compétition entre individus et le rejet de la protection sociale) et la philosophie sociale de Galton (qui justifie l’eugénisme).

Il paraît illusoire d’essayer de raisonner des fondamentalistes obstinés et voraces. Ils n’infléchiront leur position que lorsqu’ils verront un bénéfice dans la lutte contre la dégradation du climat (et des ressources naturelles) leur permettant de perpétuer leur « supériorité ». En attendant ils s’initient au greenwashing (le blanchiment écologique)…

Quant à l’interprétation rigoureuse des textes de leur religion, elle détourne de manière outrageante « la parabole des talents » (évangile de Mathieu 25, 14-30) et « la parabole des mines » (évangile de Luc 19, 11-27) – le talent étant une monnaie athénienne valant 60 mines (et non une aptitude dans le texte) – pour faire croire que Jésus-Christ encourage la spéculation (cf. L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme, Max Weber, 1905).

En effet, ces dévots assimilent Jésus-Christ au maître tyrannique que Luc et Mathieu font en réalité parler et qui conclut : « À celui qui a, on donnera encore, et il sera dans l’abondance ; mais celui qui n’a rien se verra enlever même ce qu’il a. Quant à ce serviteur bon à rien [celui qui n’a pas fait fructifié l’argent], jetez-le dans les ténèbres extérieures ; là, il y aura des pleurs et des grincements de dents ! ». De belles paroles soi-disant christiques !

La sujétion aux textes sacrés devient lacunaire lorsque le culte qu’ils vouent à l’argent est contrarié puisqu’on constate que l’épisode du Christ chassant les marchands du temple (évangiles synoptiques de Marc 11, 15-19, Matthieu 21, 12-17, Luc 19, 45-48 et évangile de Jean 2, 13-16) semble expurgé de la Bible…


20 janvier 2020

Étonnant de voir le peu de cas que les médias ont fait du problème juridique que pose l’assassinat de Quassem Soleimani et de huit autres personnes (à peine prises en compte) assumé par le président américain et organisé dans un pays étranger avec lequel il n’est pas en guerre.

Quelle que fût la menace que représentait cette personne, il s’agit bien d’une exécution extrajudiciaire (sans jugement et sans preuves) sur base de renseignements de services secrets non vérifiables…

Pour la crédibilité d’une justice intègre (ne favorisant pas les puissants), un procès à la Cour pénale internationale serait le bienvenu (afin que les motifs soient clairement exposés) car on peut désormais craindre que cette pratique d’assassinats ciblés se répande.

Cette absence de procès donne pour ainsi dire carte blanche aux gouvernants de tous pays pour éliminer lâchement (au moyen de drones tueurs), sans risques et sanctions, les personnes qu’ils estimeraient nuisibles n’importe où dans le monde.

Presque personne ne semble considérer que cet assassinat est plus immoral encore que le marchandage affairiste avec l’Ukraine, motif de l’impeachment, ce qui situe le niveau de l’idée de la justice aux États-Unis.

On peut douter que ces manières de cow-boys (tirant dans le dos de ses adversaires) de la part du président du pays le plus puissant au monde soient profitables à l’évolution morale de l’humanité.


17 janvier 2020

Après avoir visité l’exposition Darwin, l’original présentée à la Cité Miroir à Liège (jusqu’au 2 février 2020), mais réalisée par la Cité des Sciences de Paris, on se demande si le génie et la vénération du naturaliste Charles Darwin (1809-1882), connu pour sa théorie de l’évolution due au processus de la «sélection naturelle», ne devraient pas être relativisés...

On constate d’abord que Darwin n’a pas créé sa théorie, mais qu’il a adopté l’hypothèse émise 50 ans auparavant par Jean-Baptiste de Lamarck (1744-1829), qu’il a de plus été précédé par Alfred Russel Wallace (1823-1913) qui lui a envoyé un essai décrivant une théorie semblable un an avant la publication de son ouvrage L’origine des espèces publié en 1859. On peut donc penser que la théorie de l’évolution aurait de toute façon émergé sans son concours.

On comprend qu’il aura surtout eu le mérite d’avoir fait un voyage autour du monde de cinq ans à bord du Beagle (entre 1931 et 1936) durant lequel il a récolté et conservé avec méthode un grand nombre de spécimens, d’en avoir envoyé régulièrement à Cambridge (avec des notices) et d’avoir tenu un journal publié sous le titre The Voyage of the Beagle, ce qui contribuera à faire sa réputation et à légitimer son travail.

On s’aperçoit que cette théorie de l’évolution, selon laquelle les êtres vivants s’adaptent à leur milieu par «sélection naturelle» des individus les mieux adaptés, a été mal synthétisée, mal formulée, mal interprétée et qu’elle va dès lors causer des dégâts considérables en nourrissant deux idéologies funestes : l’eugénisme (avec la philosophie sociale de Francis Galton qui trouve un prolongement dans l’Allemagne nazie) et le néolibéralisme (avec le darwinisme social de Herbert Spencer qui justifie la compétition entre individus et le rejet des services publics et de la protection sociale).

Plutôt que de «sélection naturelle» Darwin aurait mieux fait de parler de «descendance avec modifications» car l’évolution résulte avant tout du hasard et non d’un principe dirigé vers la survivance des meilleurs. On remarque par exemple que le gène altruiste est néfaste dans une confrontation entre individus, mais bénéfique dans celle entre groupes d’individus (ce que Darwin a bien constaté, mais mal souligné).

Sa théorie mal entendue avalise que l’hérédité est prépondérante sur l’éducation (l’inné sur l’acquis) ce qui justifie la domination par une élite et dans la foulée le colonialisme, le racisme, le fascisme.

Si Darwin s’est clairement exprimé contre l’esclavagisme, il n’a jamais condamné publiquement les détournements de sa théorie par Galton et Spencer. Il les aurait cependant critiqués en privé ce qui laisse croire qu’il aurait estimé, à tort, ces «excroissances» favorables à sa notoriété.


15 janvier 2020

Réalise-t-on vraiment que pour préserver les ressources de la planète, limiter le réchauffement climatique, la pollution, la disparition des espèces et des espaces vitaux, il va falloir enrayer la mécanique implacable du marché, tout un processus, un principe de production de richesses résultant de l’essence égoïste et prédatrice des Hommes qui exploitent ce système : accroître sa richesse à titre personnel et augmenter la croissance à titre national (le PIB) ?

Difficile de croire qu’un pays comme les États-Unis (sans être le seul) va renoncer à conforter sa superpuissance économique, financière et militaire. On devine bien qu’il exploitera le pétrole (et autres ressources) jusqu’aux dernières gouttes (ou dernières pelletées).

Pense-t-on vraiment qu’on va pouvoir faire régresser (et vite) les modes de vie de plus en plus gourmands (en Occident et ailleurs : il faudrait 5 planètes si l’humanité adoptait le train de vie des Américains, 3 pour celui des Belges), passer d’une société de consommation à une société ayant pour credo l’osmose avec la nature ?

Est-ce réaliste de penser qu’on va pouvoir supprimer les paradis fiscaux (réceptacle des bénéfices des plus grands prédateurs et moteurs de l’exploitation maximale des ressources naturelles et humaines), stopper l’action dévastatrice des multinationales (leur bras armé).

On aura beau multiplier les alertes et tentatives de conscientisation, on pressent bien qu’elles n’aboutiront au mieux qu’à des gestes et comportements responsables du citoyen, des efforts (sans doute aussi de son portefeuille) qui resteront accessoires tandis que les grands mécanismes de nos sociétés resteront en place (la question favorite des journalistes restant : "Et qu’est-ce que chacun peut faire au niveau personnel au quotidien ?")

Il faudra malheureusement une ou des catastrophes majeures, mettant en danger la vie et les avoirs des acteurs économiques et financiers pour infléchir le modèle économique actuel (des canicules insupportables, un air irrespirable, des pandémies dues à la pollution, des pénuries de produits vitaux et d’eau potable). Des catastrophes qui les obligeront de se poser enfin la question de comment s’assurer une prospérité sans croissance (voir le livre de Tim Jackson) qui ne trouve encore aucune réponse…

PS : le type de catastrophe ayant lieu pour l’instant en Australie reste loin de pouvoir influer sur un changement de modèle économique quand on constate que l’organisation de l’Open d’Australie autorise le déroulement du tournoi et que les participants acceptent de jouer dans la fumée des incendies au mépris de leur santé (dont l’entretien est le but premier du sport), on voit où en est le niveau de conditionnement par le système…


14 janvier 2020

L’indicateur le plus efficace pour prendre conscience des limites planétaires est sans doute celui du jour du dépassement global (calculé par l’ONG Global Footprint Network d’après plus de 15.000 données des Nations Unies) où l’humanité a épuisé les ressources annuelles de la Terre. Ce jour de dépassement était le 29 juillet en 2019 (avec des disparités énormes suivant les pays : le 22 février pour le Quatar et le 18 décembre pour l’Indonésie).

Après cette date, nous surexploitons les écosystèmes, compromettons la capacité de régénération de ses réserves et d’absorption des gaz à effet de serre. Nous vivons à crédit. Dès aujourd’hui, l’équivalent d’1,7 planète (2 planètes en 2030) est nécessaire pour assouvir les besoins humains.

Tous les humains ne sont donc pas responsables dans les mêmes proportions puisqu’il faudrait 5,2 planètes si l’humanité adoptait le train de vie australien, 5 planètes pour l’américain, 3 planètes pour le français et le japonais, 2,1 pour le chinois, etc. La cause essentielle est donc le mode de vie de plus en plus gourmand en ressources et la dépendance des énergies fossiles.

Les conséquences sont la déforestation, le déclin de la biodiversité (67 % des animaux sauvages ont disparu depuis 1970 notamment avec la disparition de leur espace vital), les pénuries en eau, l’acidification des océans, l’érosion des sols, l’accumulation des déchets, l’élévation de la concentration en CO2, etc.

Les mesures à prendre sont connues : diminuer l’émission des gaz à effet de serre en s’affranchissant des énergies fossiles, stopper la déforestation, diminuer notre consommation de produits dérivés des animaux, lutter contre le gaspillage alimentaire, opter pour des modes de production plus durables comme le bio, l’agroécologie, la permaculture, etc.

Mais il faut regarder la réalité en face : elles sont illusoires. La puissance du marché (notamment des multinationales) est inexpugnable. On devine bien qu’un pays comme les États-Unis (suivis de beaucoup d’autres), plus grande puissance financière, économique et militaire mondiale, continuera à exploiter le pétrole et les ressources naturelles aveuglement partout dans le monde pour conforter sa position et maintenir son mode de vie (sous pression des lobbies).

Il étonnant de voir, par exemple, que le pays le plus avancé dans les recherches sur la pile à combustible hydrogène, qui peut révolutionner notre mode de transport et de chauffage, sont menées par la Corée (et non par les Etats-Unis ou l’Europe) !

De telles mesures ne seront sans doute prises qu’après une catastrophe majeure qui posera peut-être alors la question de comment s’assurer une prospérité sans croissance (voir le livre de Tim Jackson) c'est-à-dire en permettant aux ressources de la planète de se régénérer, en conservant des espaces vitaux nécessaires, en maintenant des bonnes conditions de vie sans que la quantité de nos déchets nous nuise.


13 janvier 2020

Trente et un mille scientifiques sceptiques sur le réchauffement climatique (en majorité américains), dont des prix Nobel, ont signé l’Oregon Petition. Ils accusent le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemtal sur l’évolution du climat créé par l’ONU) d’être trop orienté… en fonction de leur financement. Ils attribuent le réchauffement à un cycle naturel (notamment à l’activité solaire) et non à l’activité humaine. Ce réchauffement serait responsable de l’augmentation de la quantité de CO2 dans l’atmosphère (et non l’inverse).

Une telle démarche sème la confusion et n’encourage évidemment pas les pouvoirs publics (à commencer par ceux des États-Unis) à prendre des mesures. Pourtant, même si le réchauffement climatique n’augmentait ne serait-ce que de quelques pour cent en raison de l’activité humaine (proportion farfelue vu que le CO2 est un gaz à effet de serre reconnu et que l’estimation raisonnable est 95%), il mériterait d’être combattu (puisque celui qui serait dû au Soleil est indéfectible) en développant les énergies renouvelables notamment la pile à combustible dans le transport et le chauffage domestique, un développement freiné par les lobbies du gaz et du pétrole que ces mêmes scientifiques sont moins prompts à relever.

En effet, ces quelques pour cent de réchauffement dû à l’activité humaine, que même les climatoseptiques les plus extrêmes ne peuvent nier, précipiteront de toute façon le basculement du « système Terre » dans un processus incontrôlable.

Ce système est animé par des facteurs aujourd’hui neutres ou bénéfiques qui peuvent devenir nuisibles si on atteint une température critique au-delà de laquelle l’augmentation de CO2 et de méthane naturels deviendrait exponentielle. Le processus de réactions s’auto-entretiendrait dès lors sans que l’Homme ne puisse plus intervenir pour empêcher la Terre de devenir une étuve.

Forêts et océans qui absorbent plus la moitié des émissions de carbone actuellement ne pourront plus remplir leur rôle, la surface des forêts étant diminuée et les océans saturés en CO2.

Le dégel progressif du permafrost (en Russie et au Canada) libérera Méthane et CO2 correspondant à environ quinze années d’émissions humaines.

Un réchauffement (de 3°C) favorisera le dépérissement de la forêt amazonienne et des incendies susceptibles de relâcher des milliards de tonnes de CO2 (d’actualité en Australie).

Le miroir blanc de la banquise qui renvoie 80% des rayonnements solaires disparaîtra progressivement pour laisser l’océan les absorber en se réchauffant (un premier été sans banquise est prévu dans l’Arctique avant 2050)

La calotte glacière de l’Antarctique et du Groenland en fondant conduira à une hausse du niveau de la mer de 13 mètres mettant sous eau deux tiers des mégapoles du globe.

Ces événements en cascade amèneront des catastrophes et créeront une atmosphère invivable. On estime que la terre dans cet état ne pourra pas abriter plus d’un milliard de personnes.

L’optimisme béat en matière de réchauffement apparaît plus dangereux que le catastrophisme…


10 janvier 2020

L’indicateur statistique de l’espérance de vie mérite d’être examiné puisqu’il sert d’argument massue pour justifier le recul de l’âge de la retraite alors qu’il est en réalité le paravent d’un défaut de fonctionnement.

On devrait déjà admettre qu’en soi le recul de l’âge de la retraite dans un monde où le progrès social devrait logiquement accompagner le progrès technique est une aberration. Il est révélateur d’une anomalie, d’une organisation biaisée de la société qui empêche la juste redistribution des richesses créées (qui n’ont jamais été aussi élevées).

En outre, une espérance de vie plus grande n’entraîne pas forcément une espérance de vie en bonne santé ou sans incapacité (EVSI). Il suffit de visiter une maison de repos pour s’en rendre compte. Elle est estimée à 63 ans et 7 mois en Belgique.

L’espérance de vie à la naissance en Belgique en 2018 était de 81,5 ans pour l’ensemble de la population (soit de 83,7 ans pour les femmes et de 79,2 ans pour les hommes). Mais il faut remarquer la grande disparité suivant le sexe et les régions (dont il n’est pas tenu compte dans le recul de l’âge de la retraite) puisqu’elle tombe à 77,1 ans pour les hommes en Wallonie (et encore plus bas dans certaines villes : Charleroi et Liège). Si les statistiques de l’espérance de vie doivent définir l’âge de la retraite de façon précise pourquoi perdent-elles de leur effet de précision quant au sexe et au lieu de vie ?

L’espérance de vie à la naissance, calculée une année donnée, représente donc la durée de vie moyenne d’une population fictive qui vivrait toute son existence dans les conditions de mortalité de cette année-là (on calcule d’abord la mortalité par âge c'est-à-dire le rapport entre le nombre de personnes décédées à un âge donné et le nombre de personnes vivantes ayant cet âge dans la population considérée pour faire ensuite la moyenne de durée de vie en se fondant sur ces proportions pour une génération fictive de 1000 personnes).

Ces conditions de mortalité ont été favorables jusqu'à présent, mais sont en passe d’atteindre un seuil et risquent de se dégrader (au cours des années à venir) vu la perte de certains acquis sociaux, du durcissement des conditions de travail, de la pollution atmosphérique, etc. L’espérance de vie est d’ailleurs déjà en baisse aux États-Unis (ce pays « éclaireur ») depuis plusieurs années, ainsi qu’au Royaume-Uni et dans les pays de l’Est (La Belgique ayant aussi enregistré une baisse en 2012 et 2015).

Il faut donc se rendre compte que l’espérance de vie est fondée sur un calcul fictif réalisé à partir des conditions de mortalité du moment et qu’il est un argument non valide pour justifier un recul de l’âge de la retraite dans une société progressiste. L’impératif financier de ce recul devrait être compris comme l’alerte d’un dysfonctionnement majeur (surtout fiscal) dans la gestion de notre société.


9 janvier 2020

Soif, d’Amélie Nothomb, éditions Albin Michel, 2019.
Vingt-huitième livre publié par l'auteur belge dans cette maison d’édition.

L’auteur se met dans la peau de Jésus-Christ pour raconter son procès, son emprisonnement, son supplice (son chemin de croix et sa crucifixion), son agonie et sa résurrection. Le récit est à la première personne du singulier, l’histoire étant racontée par Jésus-Christ lui-même. L’idée n’est pas inédite puisque Jean d’Ormesson l’a utilisée (en laissant s’exprimer le « Vieux » c'est-à-dire Dieu à la première personne) dans C’est une chose étrange à la fin que le monde, Éditions Robert Laffont, 2010.

Jésus-Christ se livre à une introspection, exprime son ressenti face aux événements, ses douleurs physiques, réfléchit sur sa situation, sur le comportement des gens auxquels il est confronté, sur ses disciples (notamment Judas, Jean et Pierre) et revient sur ce qui l’a distingué du commun des mortels : les miracles (au nombre de 37).

Son premier miracle, celui d’avoir changé l’eau en vin aux noces de Cana, est son préféré parce que c’est le plus léger (après il ne sera question que de maladies et de mort). Le miracle du figuier stérile (Que jamais fruit ne naisse de toi ! Matthieu 21 :8-22) est celui qu’il regrette parce qu’il est négatif et sonne comme une sanction.

Jésus-Christ en veut à son père qui selon lui est dépassé par sa création parce qu’il n’a jamais eu de corps, une création comparée à une maison conçue par un architecte qui n’en aurait jamais habité une, qui serait sans domicile…

Il regrette sa renommée pour envier la vie commune, la douceur de l’anonymat, le quotidien, la vie simple, la mort qui serait venue alors comme un endormissement.

Des libertés sont prises avec le récit des évangiles, car Jésus-Christ n’aurait pas passé une nuit d’emprisonnement avant son exécution puisqu’il aurait été jugé de suite après son arrestation au jardin des Oliviers. Les miraculés, ceux qui ont profité de ses miracles n’ont pas défilé au procès pour porter des témoignages à charge... L’auteur en fait un pécheur avant l’heure en laissant clairement entendre qu’il a couché avec Madeleine…

Son amour pour Madeleine lui permet de communiquer sans parler grâce à un faisceau d’or qu’elle incorpore… Cet amour perdure au-delà de la mort contrairement à celui du narrateur de La fin de la jalousie (une nouvelle de Marcel Proust) qui guérit de sa maladie en mourant, signifiant par-là que l’amour ne serait que jalousie…

Une belle réflexion s’ensuit : « On ne choisit pas d’être amoureux. Les êtres qui ont un ego trop grand ne tombent pas amoureux parce qu’ils ne supportent pas de ne pas choisir. Ils s’éprennent d’une personne qu’ils ont sélectionnée : ce n’est pas de l’amour ». Elle souligne que l’inconscient et l’intuition doivent dominer.

Le titre de Soif fait référence à une des sept dernières paroles de Jésus-Christ sur la croix : « J’ai soif » (l’antépénultième). Tout serait à découvrir dans la soif, car quelle que soit la préoccupation physique ou mentale du moment, elle se trouverait aiguisée, précisée, magnifiée par la soif qui nous emporte dans un élan mystique.

Ce livre est donc une mise en situation qui humanise Jésus-Christ, le présente comme un humain commun si ce n’est qu’il accomplit des miracles en ayant recours au pouvoir de « l’écorce » (qui se loge juste sous la peau) auquel on accède en abolissant sa pensée, en cessant d’exister.

Il invite à une réflexion philosophique sur le récit biblique, mais ne suscite pas une lecture entraînante du fait de son absence de suspens (son histoire est connue).

L’intérêt ne se trouve donc pas dans la narration, mais dans la réflexion et les observations autour de cette histoire que l’auteur s’est plu à romancer. Les considérations apparaissent parfois un peu forcées et d’un intérêt variable peut-être pour entrer dans le format habituel…


4 janvier 2020

Le futur du monde global : Le testament de Gorbatchev, Flammarion, 2019 de Mikhaïl Gorbatchev, Françoise Mancip–Renaudie et Olivier Mannoni pour la traduction

Mikhaïl Gorbatchev fut le dernier président de l’URSS du 15 mars 1990 au 25 décembre 1991 (date de sa dissolution avant de devenir la Fédération de Russie).

Prix Nobel de la Paix en 1990, il est l’artisan de la fin de la guerre froide en initiant la Perestroïka (la «restructuration» consistant en des réformes économiques et sociales) et la Glasnost (la «transparence» se traduisant par une plus grande liberté d’expression). En 1991, il négocie et signe avec H. W. Bush l’accord START 1 qui engage les deux grandes puissances à réduire leur arsenal nucléaire de 30 % (il avait déjà signé le traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire en 1987 avec Ronald Reagan). Celui–ci a bien sûr été remis en cause depuis lors.

L’auteur dresse un bilan actuel de l’état du monde, ses commentaires à portée universelle révèlent une lucidité et une sagesse rares pour un chef d’État.

Il est clair que l’administration américaine en particulier celle de Donald Trump encourage une rivalité politique, économique et militaire croissante. Les États-Unis cherchent une supériorité militaire absolue pour pouvoir dominer la politique mondiale, imposer leur volonté et défendre leurs intérêts.

Les États-Unis devront comprendre tôt ou tard que la sécurité et la paix dans le monde ne pourront jamais être obtenues de manière unilatérale aux dépens de la liberté de choix, de l’autodétermination des autres pays. Elles doivent être le résultat d’une entente entre tous et non d’une Pax Americana. Personne ne peut s’arroger le droit d’être le gendarme du monde en lançant des opérations militaires sans l’accord de l’ONU.

Il souligne que la fin de la guerre froide est une victoire commune et non une victoire de l’Ouest résultant d’un rapport de force (comme le laissent entendre les Américains). La Charte de Paris adoptée par 34 pays en 1990 dans le contexte de la réunification de l’Allemagne et de la chute des régimes communistes en Europe a été oubliée pour verser dans le triomphalisme occidental.

La mondialisation aggrave les contradictions, les inégalités et les conflits dans différentes régions. Les pays industrialisés et leurs multinationales ouvrent des marchés pour servir leurs seuls intérêts : une nouvelle forme de colonialisme.

La vague de populisme généralisée actuelle est due à l’insatisfaction et la déception. Mais le vote à l’extrême-droite provoque l’enrichissement des riches et la résurrection de l’autoritarisme. De nombreux régimes répriment les droits et libertés des citoyens en se dissimulant sous des slogans démocratiques. Ils étouffent l’opposition, les médias et les tribunaux.

La fin de la guerre froide scelle la victoire du capitalisme et du marché néolibéral où l’État renonce à ses obligations à l’égard des citoyens alors que c’est un modèle d’économie sociale qui a permis à l’Europe de renaître après la 2ème guerre mondiale.

La nouvelle économie (suggérée par le « consensus de Washington » en 1989) est fondée sur la compétition, la dérégulation, la privatisation des profits et la collectivisation des pertes si bien que le niveau des classes moyennes stagne malgré les énormes progrès technologiques. La fiscalité est taillée pour les intérêts des plus riches, leurs taux d’imposition diminuant chaque année avec des possibilités de dissimuler l’argent dans les zones offshore (en Grande-Bretagne 10 % des plus pauvres consacre aux impôts une part plus importante que 10% des plus riches !)

Ce marché débridé crée des crises, des injustices sociales et des catastrophes écologiques, mais l’étatisation complète de l’économie n’est pas possible non plus, car elle génère un monopole idéologique, un parti unique, un État totalitaire. Le modèle à mettre en place est une combinaison d’économie de marché et de principes de responsabilité sociale et écologique régulé par l’État. Le libre-échange ne peut pas tout régler, la consommation ne peut pas rester le seul moteur. La santé, l’éducation, la culture, la cohésion sociale doivent en faire partie.

La sociale démocratie doit défendre les travailleurs, la classe moyenne majoritaire. Il y a nécessité d’une « glasnost » mondiale avec obligation de rendre des comptes. Il faut unir au plus vite la politique à la morale.

L’auteur voit deux grandes menaces pour la planète :

- les guerres nucléaires : il rappelle que les États-Unis et la Fédération de Russie détiennent 90 % des armes nucléaires, qu’il existe des centaines d’arsenaux dans ces deux pays et qu’un seul suffirait à éliminer l’Humanité (note personnelle : la Belgique stockerait une vingtaine de têtes nucléaires américaines sur la base de Kleine-Brogel, les Pays-Bas une trentaine, l’explosion d’une centaine d’ogives nucléaires suffirait à provoquer un hiver nucléaire global qui serait fatal aux plantes, aux animaux et aux êtres humains). Il souligne le danger d’une militarisation du cosmos (d’envoi d’armes dans l’espace) et estime que le conseil de sécurité de l’ONU doit en tenir compte et être conforté.

- la détérioration des conditions de vie : le système actuel ruine la capacité de la planète à produire de l’air et de l’eau purs. Depuis 1970 60% des animaux sauvages ont disparu et en 2030 il ne restera que 10 % des forêts tropicales humides. Tandis que le réchauffement climatique va provoquer des catastrophes de plus en plus nombreuses (inondations, cyclones, incendies). Qu’on le veuille ou non, il faudra transformer les domaines de l’énergie, de l’industrie, de l’agriculture, de la pêche, du transport, de la procréation et de la consommation pour laisser le temps à la planète de renouveler ses ressources. On va devoir concevoir des modèles différents de développement social et économique sans qu’il résulte d’un consensus au goût de Washington.

Les positions mondiales de l’Union Européenne vont dépendre de ses structures internes. Elle s’est élargie trop rapidement (notamment pour soustraire les pays de l’Est à l’influence soviétique) à des pays qui ne respectent pas les normes communes (en économie, protection sociale, fiscalité) et où la corruption est courante ; ce qui provoque du mécontentement.

On s’aperçoit que les économies qui marchent le mieux (Japon, Singapour) sont celles où le stratégie économique est mise au point conjointement par l’État et les acteurs de l’économie. Tous les problèmes y sont très étudiés et les traditions respectées ce qui engendrent optimisme et confiance (l’espérance de vie des Japonais est de 84 ans, la plus élevée au monde).

Il faut régler les problèmes du Proche-Orient, car le statu-quo débouchera sur le terrorisme et des migrations. Il ne s’agit pas de conflit entre cultures, mais entre civilisation et barbarie. Il faudra parvenir à une coexistence des différentes cultures, car les musulmans (par exemple) représentent un quart de la population mondiale.

La société civile prend conscience de ses droits, les gouvernements qui cherchent à l’opprimer se privent de leurs sources d’engagement et de progrès. Une société civile mondiale semble vouloir s’organiser (pour régler les problèmes d’environnement, de désarmement, de pauvreté, des droits fondamentaux, des libertés des femmes) avec une démocratisation des organisations internationales ce qui serait préférable à un gouvernement mondial. La participation de la population aux débats politiques sera indispensable à l’avenir.

L’économie russe est trop dépendante de l’exportation de ses matières premières (le gaz). Elle n’est pas assez diversifiée et la concurrence y est insuffisante. On doit supprimer les barrières artificielles dans le commerce et l’investissement. Il faut moderniser le système de santé, de l’éducation, et de la construction.

Gorbatchev estime que le système politique russe souffre d’un déséquilibre au profit du pouvoir exécutif et présidentiel. Il n’est pas opportun de laisser en l’état le système qui permet la réélection d’un président après une interruption ce qui a permis à Poutine d’exercer actuellement son 4ème mandat (qu’il a en outre fait prolonger à 6 ans).

Pour l’auteur, l’Occident refait de la Russie un ennemi (via la presse notamment). Elle est toujours considérée coupable de tout. Dans le cas du transfert de la Crimée par exemple, on n’a pas voulu tenir compte du référendum de 2014 qui confirmait que son peuple voulait rester en Russie.

En ces temps de montée en puissance de la violence à travers le monde, il rappelle les mots d’Helmut Kohl : « La guerre et l’usage de la force ne sont plus des instruments de la politique, penser autrement c’est œuvrer à la fin du monde ».


2 janvier 2020

Première personne : Conversation avec Vladimir Poutine, So Lonely, 2016
Propos recueillis par les journalistes russes Natalia Guevorkian, Natalia Timakova, Andreï Kolesnikov, Ksenia Bolchakova (pour la traduction)

Une biographie sans complaisance, sous forme de dialogue (questions–réponses), une lecture vivante et rapide pour cerner au plus près la personnalité d’un personnage qui entrera certainement au panthéon des présidents russes (avec Lénine et Staline).

Vladimir Poutine président de la Fédération de Russie en 1999 (après la démission de Boris Eltsine) jusqu’à 2008 (la Constitution l'obligeant à céder son poste pour 4 ans à Dmitri Medvedev) est reconduit dans sa fonction depuis 2012, fonction qu’il gardera jusqu’en 2024 (puisque les mandats ont été allongés à 6 ans).

Né en 1952 dans une famille ouvrière de la banlieue de Leningrad (Saint–Pétersbourg depuis 1991), il a eu deux frères morts en bas âge.
Pas spécialement doué pour l’école, sa motivation à l’étude s’est accrue après la vision des épisodes « Le glaive et le bouclier » (série télévisée de Vladimir Bassov, 1967) où il a compris qu’un seul espion plus qu’une armée entière pouvait décider du sort de milliers de personnes.
(Devenu président, il doublera d’ailleurs l’aide aux réalisateurs capables d’élaborer des valeurs correspondant aux besoins de la société et aux priorités stratégiques choisies pour développer le pays).

Se destinant d’abord à l’aviation militaire, il se dirige vers des études de droit dans la perspective d’intégrer le KGB. Devenu officier du KGB, il est envoyé 5 ans à Dresde en Allemagne de l’Est (jusqu’à la réunification de l’Allemagne) où il apprend l’allemand (mais pas l’anglais). À son retour, il devient l’adjoint au maire de Leningrad sans démissionner du KGB. La perte des élections du maire ne l’empêche pas d’avoir une ascension fulgurante dans l’appareil étatique russe. Il occupe différents postes avant de devenir le Premier Ministre de Boris Eltsine (Président de 1991 à 1999).

Il ressort des dialogues que ce ne serait pas la carrière, le pouvoir de commander ni la fortune qui motivent Poutine mais la grandeur de son pays qu’il veut contribuer à rétablir (en restaurant l’influence russe sur la scène internationale notamment) et cela passe selon lui par des valeurs morales à retrouver. Les procureurs doivent être des modèles de moralité et d’éthique professionnelles. Il veut donner de bons salaires aux juges, notaires, etc. (2.000 € alors qu’ils sont aux alentours de 5.000 € en Occident) pour renforcer le pouvoir juridique, lutter contre la prostitution via des mesures sociales et économiques, etc. Mais On s'aperçoit que ces valeurs morales deviennent mal définies lorsqu'il s'agit de laisser s'exprimer l'opposition au régime.

Les modèles de Poutine sont Pierre le Grand, Bonaparte et De Gaulle, comme eux, il se veut visionnaire. Il est partisan d’une politique verticale qui depuis Mikhaïl Gorbatchev (Président de 1990 à 1991), artisan de la libération économique, culturelle et politique avec la Perestroïka (réformes économiques et sociales entre 1985 et 1991) et la Glasnost (politique de liberté d’expression dès 1986), était devenue horizontale.

Vladimir Poutine se distingue par une pensée claire, des objectifs précis, une grande clairvoyance, un sens de la psychologie, une faculté d’analyse des situations et des personnalités (sans doute hérité de son passé au KGB), une certaine audace, autorité, fermeté, ténacité et rigueur. Des qualités selon moi mal placées car au service d’une cause qui ne sert pas l’entente internationale.

Travailleur patient et constant, on lui connaît peu de vices sinon qu’il aime boire un verre à l’occasion. Il est marié depuis trente–six ans avec Lioudmila Chkrebneva avec qui il a eu deux filles, mais on soupçonne qu’il entretienne une relation depuis le début des années 2000 avec Alina Kabaeva, une médaillée d’or olympique en gymnastique rythmique (30 ans plus jeune que lui) avec qui il aurait eu aussi des enfants (cet aspect de sa vie privée n’étant évidemment pas abordé dans le livre).

Il a connu des déboires dans sa carrière et sur le plan privé dont il s’est toujours relevé (sa femme a eu un grave accident de voiture dont elle a mis plusieurs années à se remettre, sa maison qu’il a mis 6 ans à construire a brûlé…)

Son souci premier en tant que président a toujours été d’éviter la balkanisation de son pays en réprimant sévèrement les rebelles tchétchènes, de recentraliser le pouvoir (il trouve que la monarchie a des avantages).

Il accorde beaucoup d’importance aux gouverneurs des régions de son immense pays. Il veut travailler en équipe à la grandeur de la Russie, libéraliser l’économie, mais sans tout privatiser. Il considère que les communistes (les bolcheviques) qui veulent tout nationaliser sont dépassés.

Il facilite l’installation de multinationales (firmes pharmaceutiques, Coca–Cola, etc.) grâce à des incitations fiscales (le taux standard d’imposition pour les sociétés est fixé à 20 % mais peut être réduit dans de nombreux cas – à zéro dans le secteur numérique). La Fédération de Russie se faisant une place dans la liste (déjà très longue) des paradis fiscaux.

On comprend qu’un tel président plaise au peuple russe après la dissolution de l’URSS en 1991 (perte de 3,6 % de son territoire et 26 % de sa population) mais sa course à la grandeur (qui va de pair avec celle de l’armement) risque de nous ramener au temps de la guerre froide avec son lot de défis et provocations.

À l’heure des grands problèmes de pollution et de la surexploitation des ressources naturelles, l’humanité dans son ensemble ne peut que souffrir de dirigeants fiers–à–bras mus par la soif de pouvoir et de prestige qui veulent en imposer en méprisant les codes de la bonne gouvernance, de la diplomatie et de la courtoisie (tels Donald Trump, Kim Jong–Un, Recep Erdogan, Bashar Al–Assad, Benyamin Netanyahou, Boris Johnson, Emmanuel Macron). Ces comportements risquent tôt ou tard de mener à des guerres de convoitises catastrophiques.

L’humanité a besoin de dirigeants altruistes à vision universelle (et non pas à vision nationaliste), de sages sachant faire la part des choses sur l’exemple de grandes figures comme Mikhaïl Gorbatchev, Mahatma Gandhi, Nelson Mandela, Martin Luther King… animées par la fraternité et la préservation du bien commun.